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Entretien réalisé en novembre 2019 de Provence Poésie avec Daniel GLIZE

 

1 Présentation de l’auteur :

Je suis roquevairois depuis cinq ans et ancien aubagnais de trente ans. Si j’ai toujours écrit des poèmes, en autodidacte, depuis l’adolescence, pour des occasions de rassemblements familiaux ou des départs en retraite de collègue, je me suis vraiment mis à lire et à étudier la littérature, dont la poésie, à ma retraite, il y a plus de huit ans, et à écrire évidemment.

J’ai intégré l’Université du Temps Libre d’Aubagne depuis septembre 2014 en tant que professeur de poésie d’un atelier, et l’année suivante, Denise Biondi, secrétaire de « Provence Poésie » est venue me solliciter pour faire partie du jury du concours de nouvelles de Provence-Poésie. Depuis, nous collaborons en échange mutuel avec l’Association en faisant participer Denise et Danyel au Printemps des Poètes que j’organise avec l’UTL.

 

2 Comment êtes-vous venu à l’écriture ?

C’est la lecture du roman « La neige sur les pas » d’Henri Bordeaux, Académicien qui m’a bouleversée par son style et ses envolées poétiques. Mes passions pour l’histoire et la poésie se sont imbriqués alors pour écrire des textes et des poésies parlant des légendes et des histoires des villes où j’ai habité : Eyguières (2013), Salon de Provence (2017), Roquevaire (en attente). Mon amour pour l’eau va m’inciter à composer un recueil de quarante-cinq poèmes sur les fontaines et lavoirs de vingt-cinq villes de Provence (2016).

J’ai participé à des concours de poésie où j’ai gagné des prix sur des recueils (1er prix d’Eyguières en 2014 avec « En Mouvement », 1er prix du Mont Saint-Michel en 2015 avec « Poésies Sportives » et 2nd prix de Saint-Junien avec « Accents et ponctuations se conjuguent » en 2019), et des poésies individuelles (1er prix de l’Aniridia Europe avec « L’aniridique » en 2017, 1er prix de l’humour de Nyons en 2018 avec « L’autoportrait de Cérumen de G. »).

Mes livres de chevet sont poétiques où Baudelaire, Verlaine et Victor Hugo bercent mes nuits.

 

3 Présentation du dernier livre :

 « Nouvelles et Poésies Sportives », Editions Provence-Poésie,18 euros, 260 p., paru en 2018.

Les anecdotes en sport ont toujours nourri ma curiosité et mon enseignement à la Faculté des Sciences du Sport (Marseille). Les champions d’exception m’ont attiré par leur exemple, par leurs valeurs d’abnégation, de courage, de sacrifice pour atteindre leur rêve, leur idéal. En alternant des nouvelles et des poésies, plus de cinquante sports vous seront dévoilés selon un angle poétique, historique ou anecdotique. Les exploits de célébrités (Johnny Weissmuller, Michael Phelps, Laurent Fignon, etc. …) seront présents comme des tranches de vie de sportifs moins connus mais qui ont brillé par leur chance (Bradbury en patinage), leur courage (Eric l’anguille en natation, Eddie l’aigle au saut à ski), leur altruisme (Thierry Gueorgiou en course d’orientation) ou leur transcendance (les handicapés aux Jeux Olympiques ou Paralympiques).

 

4 Souhaitez-vous passer un message aux lecteurs ?

J’aime faire passer mon élan poétique et ma passion des mots à travers des poésies, des histoires tirées de légendes provençales ou universelle (roman historique sur Archimède de 2016).

 

5 Avez-vous une autre vie en dehors de l’écrit ?

Peut-on pénétrer dans une intimité différente ? 

En boulimique de la vie et en curieux insatiable, tous les arts me passionnent. Aussi, le temps qui ne m’est pas consacré à ma famille est occupé par la sculpture (pendant trois ans), par la danse de salon que je pratique toujours avec mon épouse depuis presque vingt ans. Depuis que je suis à Roquevaire, je me consacre à la poterie où mon envie de modeler la terre va jusqu’à participer à des expositions communales depuis cinq ans.

C’est dans cet esprit d’ouverture sur tous les arts qu’en tant que professeur de poésie à l’Université du Temps Libre d’Aubagne (depuis septembre 2014), j’ai créé une manifestation pour le Printemps des Poètes où huit arts sont unis par les mots et les vers de la poésie avec des musiciens, danseurs et chanteurs.

 

6 Que souhaitez-vous dire à ceux qui vont acheter votre livre ?

Si le sport vous est peu ou pas connu, je vous ferai découvrir ce monde dans ses variétés infinies où toutes les dimensions de l’affect et du moteur humain s’y dégagent dans un élan extrême que seuls peuvent porter l’expert dans ses aspects individuels ou collectifs.

 

7 Existe-t-il une question que vous aimeriez qu’on vous pose ? Pourquoi ?

Pas spécialement

 

8 Auriez-vous un texte ou un extrait de texte rapide à lire pour clôturer l’entretien ?

 Extraits de « le lavoir de Bormes », tirés du livre « Eyguières au fil de l’eau » (2013)

            Il faut s'asseoir au calme, adosser au lavoir pour entendre les murs suinter leurs murmures. Ils susurrent des bruits venus d'un autre temps qui ne font plus écho à notre temps présent.

Ce sont les chocs étouffés des battoirs qui frappent le linge mouillé ; c'est la claque de l'eau qui tombe en paquet dru sur la pierre à frotter quand les draps sont tordus ; c'est le glissement soyeux du savon sur le linge ; c'est le crissement pesant d'une roue de brouette qui rythme son approche ; c'est le souffle haletant des femmes qui peinent à tordre les nappes gorgées d'eau ; c'est la chute obsédante de l'eau qui s'égoutte larme à larme du linge; c'est le craquement sourd de la paille écrasée sous les genoux des femmes ; c'est les rires contenus ou leurs éclats stridents ; c'est la chanson fredonnée ou chantée ; c'est …

            Il faut fermer les yeux et garder en mémoire l'eau qui glisse au cœur du lavoir, pour que des contours, des formes apparaissent. Au bout d'un certain temps, on verra s'agiter ces femmes aux bras nus et musclés, portant des chemisiers ouverts, offrant, pour certaines, la naissance des seins au regard des hommes qui veulent bien passer le long des colonnes où le chemin s'étire.

Elles sont là, courbées en deux, face à face alignées, ce sont les lavandières d'Eyguières. Les plus vieilles sont orientées au nord, vers le mur de pierre qui renvoie leurs rides et leur froideur. Elles laissent volontiers les plus jeunes se mettre en face de la route qui mène au cœur du village pour qu'elles puissent discerner le moindre indice de vie. …

            Si on reste concentré encore un moment, on pourra remarquer que ces femmes ont un travail ingrat, à genou sur la pierre dure et inclinée, courbées face aux bassins. Elles frottent sans relâche, pendant des heures durant, le linge qu'elles ont amené dans leur grand panier d'osier sur une brouette en bois ou sur leur tête, porté. Elles mouillent à grande eau les tissus des draps ou des vêtements, les frottent, les battent, les rincent et recommencent, encore et encore les mêmes gestes. …

            Il faut ouvrir son cœur dans ce lieu de dur labeur et de souffrance pour ressentir le courage, la volonté de ces femmes, leur solidarité dans l'adversité. La monotonie de leurs gestes, l'engourdissement de leurs membres, la fatigue accumulée, la piqûre du froid dans leur chair sont atténués, voire anesthésiés par la chaleur du clan. Seule, elle ne tiendrait pas. En groupe, le travail est plus facilement supportable. Quand la douleur est là, lancinante et tenace, seule une mélopée chantée à l'unisson redonne le courage de poursuivre la tâche. …

Si le silence s'abat en une chappe de plomb, il faut vite le rompre pour redonner l'allant nécessaire à la tâche. .... Et quand toutes les informations du village à échanger sont données et commentées, quand chacune est devenue le héraut du village, participant à l'œuvre commune de l'échange sociale, alors certaines vont distiller des informations moins officielles, celles qui se disent à voix basse, au creux de l'oreille et dont la véracité semble certaine. On leur a dit, il faut les croire. Le murmure alors va colporter de bouche à oreille la rumeur ; faisant vite le tour, le murmure va s'enfler en mots presque audibles, des lazzis viendront ensuite alors rompre ces messes basses pour s'échanger sans retenu. Le lavoir devient dans ces moments précis un poulailler où ça caquette à qui mieux mieux.

Le temps s'écoule ainsi, dicté par les frappes des palettes entrecoupées de calme, d'effervescence ou de tempête. Le lavoir vit de pulsions, chaque lavandière y donne son battement à sa façon, pour que son cœur batte sans trop d'à-coups au rythme des battoirs.

            Il faut ouvrir son âme dans ce lieu chargé d'humanité pour comprendre que la femme de cette époque ploie sous ses devoirs, qu'elle a peu de droits et que sa parole est rare. Mais, là, au lavoir, elles sont entre elles, sans les hommes qui ont le pouvoir. Elles se donnent, tout en travaillant, tous les droits : celui de rire, de plaisanter, de chanter, de discuter, de cancaner parfois, de refaire le monde comme elles l'entendent. Elles seraient durement châtiées par les propos qui circulent ici sur la gente masculine. Elles prennent leur liberté de paroles qu'elles expriment à leur façon. Si les hommes ont le bar pour se retrouver dans leur intimité machiste, elles, les lavandières, elles ont le lavoir, leur lavoir, leur temple béni de liberté. …

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